Entre 2014 et 2016, la chambre régionale des comptes de Nouvelle-Aquitaine a procédé à l’examen de la politique d’urbanisme d’une vingtaine de collectivités littorales de son ressort1 dont Lacanau-Océan et mis en évidence les tensions spécifiques auxquelles sont confrontés ces territoires littoraux. La synthèse a été présentée en mai 2017 devant le Conseil d’administration du GIPLA2.

Dans cet article, nous avons extrait les textes qui se rapportaient directement à notre commune de Lacanau ou les avis ou préconisations du rapport sujets à réflexion ou d’intérêt général. Le dossier complet étant trop volumineux (6 MegaOctets) pour être mise en ligne sur notre site, nous nous tenons à votre disposition pour vous le faire parvenir si nécessaire. Ilest téléchargeable sur le site: https://www.ccomptes.fr/fr/actualites/urbanisme-littoral

Synthèse urbanisme littoral_4.pdf

En résumé, l’enquête aborde les  questions suivantes :

La gouvernance: quel rôle respectif attribuer aux communes et aux intercommunalités via les SCOT et PLU?

Les stratégies d’aménagement: comment répondre aux besoins d’accueil des populations et activités et aux nécessités de protection des milieux littoraux,

La défense contre les risques liés à l’érosion constatée du littoral : comment arbitrer entre consolidation du trait de côte actuel (dans les zones vulnérables méritant encore d’être protégées) et repli en zone rétro-littoral (lorsque la relocalisation apparaît inéluctable) et avec quels financements ?

 

Gouvernance

Instrument majeur de la politique d’urbanisme, la planification territoriale s’exerce essentiellement au travers des SCOT4 et des PLU. Les travaux de la chambre régionale ont révélé le manque d’ingénierie interne des communes petites et moyennes en matière d’urbanisme, occasionnant des coûts d’accompagnement élevés par des cabinets spécialisés pour l’élaboration de leur PLU, sans toujours les protéger d’annulations contentieuses dommageables en termes de délais et de frais lorsque la procédure doit être reprise. Rappelons que le PLU de Lacanau a été voté par le Conseil Municipal en juin dernier et qu’à ce jour nous comptons au moins onze recours.

Le rapport souligne que le cadre communal n’est pas adapté à une planification territoriale pertinente, la prise en compte des enjeux d’urbanisme ne pouvant être envisagée de manière cohérente et efficiente qu’à l’échelle du bassin de vie, particulièrement en zone littorale. Il souligne les interactions entre zones littorales et rétro-littorales, qui justifient une approche coordonnée de l’aménagement. Il relève également que les SCOT devraient mieux intégrer les dispositions de la loi littoral, de manière à sécuriser juridiquement les PLU.

La loi « Grenelle II » de 2010 s’était prononcée en faveur de l’élaboration du PLU au niveau intercommunal et la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a confirmé le remplacement des PLU communaux par un seul PLU intercommunal (PLUi) en principe en 2017. Les Maires de la Communauté de Communes du « Médoc Atlantique »  ayant émis des réserves sur ce point.

Stratégies d’aménagement

Pour sa part, la partie centrale de notre station, l’une des plus urbanisées du littoral aquitain, avait fait l’objet dès les années 70 de protections particulières sous forme d’enrochements longitudinaux ou d’« épis » perpendiculaires au rivage, fortement endommagées en 2014. Ce secteur relève aujourd’hui d’un « périmètre de vulnérabilité » de grande ampleur (incluant une centaine de locaux professionnels et 1 200 logements, ainsi que diverses infrastructures publiques).

Ces territoires sont confrontés à une concentration croissante des populations, sur un espace aux possibilités d’urbanisation limitées, fragile au plan environnemental et de plus en plus exposé aux risques érosion côtière. Le manque de foncier constructible et son renchérissement, exacerbé par la demande en résidences secondaires, rendent la bande littorale de moins en moins accessible aux revenus moyens et modestes.

Le tableau ci-dessus a été publié avant le regroupement des deux Communautés de Commune de la « Pointe du Médoc » et des « Lacs Médocains »3 dans la Communauté du « Médoc Atlantique » au 1er janvier 2017. Les communes ont tiré partie de cette fusion pour retarder la refonte du SCOT.

Défense contre les risques liés à l’érosion constatée du littoral

Constitué par le pied de dune pour notre côte sableuse, le trait de côte apparaît plus particulièrement menacé par l’érosion dans notre région, du fait des dernières tempêtes, le recul du trait de côte sur les espaces naturels de la commune a atteint dès mars 2014 le niveau prévu pour 2040 et les dernières études laissent augurer un recul supplémentaire de 65 mètres à l’horizon 2040 et 165 mètres à l’horizon 2100 dans ces zones.

Les stratégies nationale et régionale de gestion intégrée du trait de côte préconisent que les documents d’urbanisme (SCOT et PLU) comportent une dimension prospective renforcée d’anticipation des évolutions futures en matière d’érosion côtière en particulier. Il est par exemple proposé à cet égard de faire usage de la possibilité d’étendre la bande protégée par la loi « littoral » au-delà de 100 mètres, comme le permet l’article L 121-19 du code de l’urbanisme. Il semble que cela ne soit pas tout à fait le cas pour notre PLU même si il prend en compte le PPR (Plan de prévention des risques).

La feuille de route 2018-2020 du GIP littoral prévoit, dans le cadre de son projet « Evolution des espaces naturels, agricoles et forestiers littoraux »,  une assistance des porteurs de SCOT et de PLU en facilitant la diffusion des principes définis dans le cadre des études prospectives5, des schémas et des stratégies régionales, notamment en matière d’application de la loi littoral.

La nouvelle compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI) est confiée aux communes et à leurs groupements à partir du 1er janvier 2018. Elle inclut la « défense contre la mer » dans toutes ces composantes, ainsi qu’il vient d’être précisé par le ministère de l’environnement.

Ainsi, pour Lacanau, le choix du « repli », aussi coûteux soit-il, semblerait le plus adapté sur le long terme (2100) tandis que la lutte active se révélerait la plus pertinente à l’horizon 2040. En tout état de cause, devant l’importance des coûts en jeu, la commune de Lacanau a dû différer son choix d’une stratégie à moyen et long terme pour se limiter pour l’instant à un programme transitoire de gestion de la bande côtière pour la période 2016-2018, composé d’actions dites « sans regrets » n’obérant pas les choix qui pourraient intervenir ultérieurement. Le rapport préconise de pouvoir anticiper sur le long terme la maîtrise foncière des territoires de relocalisation, voire, si nécessaire, de permettre leur aménagement par dérogation aux dispositions de la loi « littoral » limitant l’urbanisation des « espaces proches du rivage ».

Les collectivités du littoral sont ainsi en voie de fragilisation, notamment financière au regard du coût élevé des actions d’où la nécessité de la mise en place de dispositifs dédiés n’existant pas à ce jour. Voir le refus du recours aux « fonds Barnier » pour les propriétaires de l’immeuble « Le Signal » à Soulac.

Sur la période 2011-2015, la commune de Lacanau a consacré ainsi en moyenne 350 000 € par an à la protection et à l’entretien courant de son littoral, soit près de 3,5 % de ses produits annuels de gestion. A ces dépenses courantes s’ajoutent les dépenses de remise en état de la plage et de la dune et de renforcement des ouvrages de protection après les différentes tempêtes (3,37 M€ d’investissements à la suite de celles de l’hiver 2013/201420, financés par la commune à hauteur de 73,7 %, par l’Etat pour 23 % et la région Aquitaine pour 3,3 %).

Concernant le financement des stratégies de gestion du trait de côte et l’organisation de modes de gestion innovants, les conclusions de la Chambre régionale des comptes sont claires, et les problèmes sont connus des partenaires locaux. Les travaux en cours dans le cadre de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte visent à apporter des propositions d’adaptation.

1 Communes de la région concertées : Soulac-sur-Mer (33), Lacanau (33), Soorts-Hossegor (40), Capbreton (40), Tarnos (40), Ciboure (64) et Hendaye (64)

2 GIPLA Groupement d’intérêt public Littoral Aquitain. Seul de son espèce sur le territoire national, rassemble l’Etat, les départements et les intercommunalités littorales de l’ex-région Aquitaine dans une démarche concertée de réflexion stratégique sur l’organisation de l’espace littoral.

3 COMMUNAUTÉ DE COMMUNES MÉDOC ATLANTIQUE DE L’ESTUAIRE À L’OCÉAN (FUSION DES CDC POINTE DU MÉDOC ET PAYS DES LACS MÉDOCAINS) (Carcans, Grayan-et-l’Hôpital, Hourtin, Jau-Dignac-et-Loirac, Lacanau, Le Verdon-sur-Mer, Naujac-sur-Mer, Queyrac, SaintVivien-de-Médoc, Soulac-sur-Mer, Talais, Valeyrac, VendaysMontalivet, Vensac)

4 SCOT schémas de cohérence territoriale, PLU Plan Local d’Urbanisme

5 diverses études réalisées par le GIPL sur les sites-tests de Lacanau, Contis et Ciboure